Huracan LP-610 « Chemin de Terre » Sterratosiouly ?

Même si on est Toltèque dans l’âme et que l’on a renforcé sa nature de bonnes dispositions, il est difficile de ne pas réagir avec un soupçon de soupçons devant certaines stratégies et peut-être parfois le manque d’ingénuité de nos marques fétiches. C’était le cœur de notre dernier article la semaine dernière avec la 992 Dakar… où nous posions la question de la sincérité. La découverte tonitruante de l’Huracan STERRATO rappelle beaucoup l’étrange congruence des imaginations et la collision entre Deep Impact et Armaggedon… Comme dit Wednesday Addams : une coïncidence est une coïncidence, deux c’est un indice.. trois c’est une preuve. 

STERRATO : tout terrain en Italien.

Je suis un peu joueur et un peu taquin… Sterrato n’est pas un taureau de combat, pas un animal mythique, pas un demi-dieu enclin à s’admirer dans le miroir et à glisser sur des galets devenus glissants au bord de l’eau… Non STERRATO veut seulement dire, Tout-Terrain. Il sera dorénavant accolé à l’Huracan dans une itération off-road assez inattendue. On aurait aimé un peu plus de foi, particulièrement de la part d’une marque qui avait dans les années 80 offert une Lamborghini Countach au souverain pontife. Mais je m’égare. Trois ans après la présentation du concept, le communiqué de Presse est tombé, la Sterrato n’est pas qu’un concept, elle intègre officiellement la line-up de l’Huracan et sera vendue au prix de 275 000$ en 1499 exemplaires.

Huracan Sterrato, illustration by BSS® and TMIC® support. California

Ad Libitum, ad Nauseam. 

La STERRATO est assez logiquement équipée d’une transmission intégrale, d’une hauteur de caisse plus élevée et d’une suspension modifiée. Cette Huracan est sans doute la plus singulière de toutes, en faisant la promesse d’un prodigieux éventail de talents, et tout comme la 992 Dakar en concrétisant un concept dont la synthèse était finalement inéluctable. 

Mais c’est cette sortie quasi synchrone avec la 992 qui justement ne me paraît pas relever de l’émulsion vertueuse, mais plutôt d’une débauche de séries limitées, pléthores de Supersportives surexclusives auxquelles les joailliers de l’aristocratie automobile recourent ad libitum… 

Mais est-ce seulement un sujet ? la sincérité des manufacturiers est-elle une variable pondérée par les utilisateurs. Ce qui était un avant un heureux accident, des séries sportives produites par passion et avec le désir de répondre à un impératif existentiel, voire philosophique, telles les RS Porsche ou d’autres séries extrêmes est devenu un exercice qui frise le contresens… il semble que la sommation des séries limitées soit en passe de dépasser les modèles conventionnels. J’exagère naturellement, mais ces microséries qui se succèdent avec la constance d’un métronome peinent à rallumer le feu de la passion ou du moins de ma passion. 

Depuis les premiers jours de la construction automobile, il est souvent arrivé qu’un constructeur sorte une version plus abordable et plus sportive d’une voiture.. Le cas de Porsche avec la 993 RS par exemple ou dans les années 1950 de Ferrari qui lança la 250 GT Lusso, une version plus abordable et plus sportive de la 250 GT.

Huracan Sterrato, illustration by BSS® and TMIC® support. Island

“Je voudrais la même mais plus chère”

La prospérité de la veine des sportives et ultrasportives est un superbe pied de nez de notre humaine nature aux embardées tyranniques de la majorité quand elle pense brandir l’idée d’un bien supérieur. De cela nous ne saurions nous plaindre. Ce qui en revanche peut faire le lit de l’amertume, c’est cette inflation quelque peu délirante entretenue par les marques et les clients dans un cercle insensé d’exclusivité toujours plus radicale. Aucun sens commun ne semble briser cette boucle éperdue tandis que les fabricants paraissent s’emboîter le pas à qui mieux mieux. 

La Ferrari F40, un mythe dans tous les sens du terme, s’offrait à 280 000€ en 1986, 750 000€ (5,000,000 frs) pour une McLaren F1 entre 1993 et 2000.  Aujourd’hui, une série limitée de Countach LP 800 réalisée sur une base d’Aventador  s’affiche à 2,2 M€ (1/122 exemplaires , et la Voiture Noire de Bugatti a pour principal faire valoir un tarif qui frôle les 10M€.

Le prix est devenu une composante du prix, une étrange mise en abîme héritée de la multiplication des clients potentiels de telle véhicules et de leur volonté de se distinguer non pas leur choix de vie, leur pilotage mais par leur capacité à acquérir un objet rare. Aucun jugement de valeur de notre part ; le phénomène a seulement pour corollaire cette dérive et une certaine déshumanisation d’une industrie qui jouxtait naguère les univers de l’art et de la philosophie.

Huracan Sterrato, illustration by BSS® and TMIC® support. Death Valley

« una grande opportunità ? »

Quitte à déjeuner dans un endroit hors de prix et après avoir disserté des tarifs tant et plus, mangeons ! Alors à l’heure du choix, et sans prétendre à désigner le plus gentil…  L’objectivité commande de trouver plus de panache à cette Huracan débridée de 610ch qu’on imagine sans mal en accessoire polychrome du Prochain Guardians of the Galaxy. Et puis finalement, le surcoût est presque anecdotique : 70,000$ de plus que l’Huracan Evo (200 000$ – Sterrato est MSRP : 275 000$ ), c’est finalement plus digeste que les +100% que Porsche applique au Badge de la Dakar ( 992 Carrera S 113,200$ – 992 Dakar, 2500 ex, MSRP est : 225000$) 


@bonneville ne sera certainement pas d’accord avec moi, mais ayant commencé l’article avec un certain sentiment et le terminant sur un autre, je suis heureux de ce petit voyage qui m’aura défait de l’idée de mon désir d’attribuer des bons et des mauvais points, ou de juger quoi que ce soit. Reste l’inquiétude d’un manque de substance, ou du moins de ce que je suis porté à ressentir comme tel. Let’s hope for the best. 


Commentaires

Laisser un commentaire